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26 février 2006

A LIRE ABSOLUMENT

part_de_l_autre

La Part de l'Autre, d'Eric-Emmanuel Schmitt

08 octobre 1908 : Adolf Hitler recalé. Que se serait-il passé si l'Ecole des beaux-arts de Vienne en avait décidé autrement ? Que serait-il arrivé si, cette minute là, le jury avait accepté et non refusé Adolf Hitler, flatté puis épanoui ses ambitions d'artiste ? Cette minute là, aurait changé le cours d'une vie, celle du jeune, timide et passionné Adolf Hitler, mais elle aurait aussi changé le cours du monde.

Alternées tour à tour, défilent en effet sous nos yeux deux vies que tout oppose, en fonction de causes initiales radicalement opposées. D'un côté le clochard, le caporal à la Croix de fer, le dirigeant du parti national-socialiste fan de l'opéra wagnérien Rienzi, le dictateur misanthrope dément dont le romancier développe une biographie dûment renseignée. De l'autre, Adolf H., jeune homme soigné par Freud pour ses troubles, peintre de l'école surréaliste du légendaire Montparnasse parisien, ardent défenseur du sionisme.
On passe d'un Adolf à son double comme on verse du rire aux larmes, du sérieux à la plaisanterie, de la paix à la guerre (à noter : une belle symétrie croisée lors des descriptions des ravages de la guerre de 14-18). Au carrefour de ces trajectoires où se rejoignent comédie et tragédie, l'écrivain laisse place à des approches philosophiques (pays/nation ; amour/amitié ; égoïsme/égocentrisme) qui éclairent la part d'ombre abritée par le cœur humain.

Schmitt choisit surtout d'évoquer les années de jeunesse de Hitler, celles qui vont jusqu'à la première guerre mondiale. De cette époque-là, le lecteur moyen ne sait pas grand-chose. Il se surprend, horrifié, à trouver le personnage plutôt humain.
"C'était le but du jeu, déclarera Schmitt. Montrer qu'on ne naît pas monstre, mais qu'on le devient. J'ai d'ailleurs pensé un temps intituler le roman Archéologie d'un monstre. Hitler avait un beau rêve : être peintre, jusqu'à son échec, c'était quelqu'un de fréquentable. D'étudiant, il est devenu pauvre. De cette exclusion, la rancoeur est née. Son intégration s'est faite par la guerre. Du coup, à ses yeux, la guerre est devenue un principe de l'existence. La défaite de l'Allemagne en 1918 a été un autre traumatisme. Ce qui m'intéressait, c'était de montrer comment se fabrique un homme. On est tous une même souche, qui peut donner à l'arrivée deux individus complètement différents."

La part de l'autre, d'Eric-Emmanuel Schmidt, Editions Poche. Un chef d'œuvre à ne pas manquer.

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